MARTIAL II (Martial LOLLE-LARBANÈS, dit)

Il y a tout juste 100 ans, un jeune sauteur des Hautes-Pyrénées débutait dans notre sport landais… Il s’agissait de Martial Lolle-Larbanès, dit Martial II. Né à Maubourguet le 25 février 1898, il décèdera à Mont-de-Marsan le 3 juin 1962. Voici quelques éléments de sa courte carrière qui se termina de façon dramatique.

« En 1921, il exécute son premier saut au Houga, au-dessus d’une vache de Joseph Coran. Dès l’année suivante, il entre comme sauteur dans la cuadrilla de Joseph Barrère à qui il restera fidèle tout au long de sa carrière, aux côtés de Mazzantini, Giovanni et autre Meunier, sous la protection du teneur de corde Martial I. Pendant quatre ans, Martial II se fait un nom en pratiquant presque exclusivement le saut à la course avec de grands succès comme en 1923, au Houga, au-dessus de l’inoubliable Paloma, acquise par Barrère l’année précédente. (…) Peu à peu, il néglige le saut pour l’écart. Après des débuts difficiles, son endurance, sa sincérité et son cran vont lui permettre de triompher 5 fois en 1927 (…). En 1933, Martial II est toujours parmi les meilleurs (…). Mais en 1934, à Eauze, Colita met fin à sa carrière en lui infligeant un terrible coup de corne dans le bas-ventre. »
Eléments biographiques tirés du Dictionnaire encyclopédique des écarteurs landais de Gérard Laborde (Editions Gascogne, 2008), p. 373-374 (avec l’aimable et amicale autorisation de l’auteur)

Le dessinateur Gaston Rémy a croqué, avant qu’il ne mette fin à sa carrière, sa course d’élan très dynamique :

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C’était un 22 juillet, à Tyrosse… en 1929

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D’après les indications manuscrites sur l’image, cette photographie a été prise le 22 juillet 1929, dans les arènes (peu garnies…) de Saint-Vincent-de-Tyrosse. C’est toujours agréable d’avoir ces précisions de date et de lieu pour que les documents prennent toute leur valeur. D’après le dictionnaire de l’ami Gérard Laborde, le sauteur Jean-Pierre Darricau commençait à peine cette année-là ses débuts en formelle à l’âge de 28 ans!!!

DARGERT I (Louis Darregert, dit)

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Né à Estibeaux le 20 décembre 1904, décédé à Estibeaux le 2 juillet 1968.

« Premiers écarts, tout jeune, chez lui à Estibeaux ; remarqué par Joseph Coran qui le prend à l’essai, en 1924, il se révèle peu doué pour l’écart. La saison suivante, il poursuit son apprentissage chez Danthez où il décroche même le premier prix de 600 fr. des fêtes de Dax. Mais, « possédant des moyens athlétiques peu communs et un courage à toute épreuve, qualités qui devaient en faire aussi un élément précieux dans l’entraînement et les rentrées difficiles de coursières », celui que l’on appelle désormais Dargert I dans les arènes va s’illustrer comme sauteur. Certes, il n’était pas un artiste mais sa puissance et sa vélocité lui permettent de rivaliser avec ses collègues de l’époque, durant laquelle ne se pratiquaient que le saut à la course et le saut à pieds joints. En [19]26, il signe chez Lafitte où il va faire ses grands débuts de sauteur puis dans la cuadrilla des 4 As, chez Coran, en [19]27. En [19]32, il passe chez Barrère où il va rester pendant trois saisons. (…) En 1935, il revient chez Lafitte qui a racheté le troupeau de Coran. Le 25 août, en place de Dax, lors de la novillada d’Encinas, Dargert va s’illustrer en compagnie de Joseph Coran, respectant le contrat passé avec les organisateurs: 1000 fr. pour 4 sauts durant la tarde. Cet exploit lui vaudra de jouir d’une célébrité déjà bien assise jusqu’au début de la deuxième guerre mondiale dans la cuadrilla désormais dirigée par Daniel Marcadé. »

Eléments biographiques tirés du Dictionnaire encyclopédique des écarteurs landais de Gérard Laborde (Editions Gascogne, 2008), p. 115 (avec l’aimable et amicale autorisation de l’auteur); portrait par G. Rémy, dans Les courses landaises. Souvenirs et croquis d’un revistero.

Voici deux autres dessins de G. Rémy montrant Dargert lors d’un saut à la course, puis dans une situation plus délicate…

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Et une carte-photo le montrant en action Larrivière le 5 octobre 1930 devant Arbolaria.

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Casino II et son saut du taureau en 1889

« Casino II » est né vers 1869 on ne sait où, et décédé on ne sait où ni quand… Un grand mystère entoure donc encore ce personnage. Voici ce qu’en dit Gérard Laborde :
« Parfois appelé Casino jeune. Il débute dès l’âge de 17 ans, et très vite, il se fait remarquer par son courage à toute épreuve. En 1888, Casino II éclate. Il triomphe lors des courses de la Madeleine à Mont-de-Marsan remportant le 1er prix de 350 fr. devant le maître Marin Ier (…) et tous les autres grands toréadors de l’époque. Quelques temps plus tard, pour les fêtes de Dax, si Boniface reste maître chez lui, Casino II décroche une très belle 4e place derrière Marin et Lapaloque. A Peyrehorade, devant le bétail de première force des ganaderos Bacarisse et Lagardère, Casino II « qui veut décidément arriver, fournit un travail extraordinaire et des sauts très nombreux » s’octroyant le premier prix, supérieurement protégé à la ficelle par Bacarisse le maître des teneurs de corde de l’époque. (…) Au cours de l’été [1889], Casino « se fait annoncer devant les toros de la corrida du 18 août de Saint-Sébastien, par de grandes affiches multicolores placardées dans toute la région ». Mais pour lui, cette première expérience est un fiasco ! Pourtant, la semaine suivante, il se rattrape en sautant les trois premiers bichos de la tarde avec une légère touche par le second dont il se venge par deux écarts superbes. Pourtant la critique ne lui est guère favorable : « Casino, à ses vingt ans, n’a pas la moindre science tauromachique. Il lui manque le savoir et le coup d’œil nécessaires. Mais pour le courage, allant même jusqu’à la témérité, il n’a pas besoin d’en acheter à qui que ce soit ». Et le 9 septembre, c’est le pire qui arrive : Casino est blessé très grièvement, « la cuisse transpercée, sur un saut d’un taureau à Fontarrabie ».
Eléments biographiques tirés du Dictionnaire encyclopédique des écarteurs landais de Gérard Laborde (Editions Gascogne, 2008), p. 87-88 (avec l’aimable et amicale autorisation de l’auteur).

J’ai eu la chance de trouver chez un libraire de San Sebastian deux exemplaires différents non pas de ces grandes affiches, mais d’affichettes qui en étaient peut-être la version tract (ou « flyer » comme on dirait aujourd’hui). Voici la première d’entre elles, dans laquelle l’on voit en premier lieu que le « saut du Français » représentait une attraction aussi importante que la présence des deux grands matadors Lagartijo et Angel Pastor. On y lit que le fameux écarteur (notons au passage qu’on conserve le mot français) est décrit comme le rival du célèbre Paul Daverat, et qu’il exécutera sa prestation bien sûr si l’un des taureaux veut bien s’y prêter… Ce saut est présenté comme la suerte « la plus brillante, la plus dangereuse et la plus émotionnante » du toreo français. On précise par ailleurs que Casino a obtenu de nombreux succès avec ce saut et qu’il a gagné grâce à lui de nombreuses médailles dans les concours de sauteurs. On concluait en rappelant la grande différence qui existait entre les vaches landaises et les vigoureux taureaux de combat espagnols, différence qui fournirait au spectacle son intérêt dramatique. En sachant que Casino vaincrait les terribles dangers auxquels Daverat avant lui avait été confronté dans cette même plaza.
Malheureusement sa prestation ne fut pas à la hauteur de la publicité qu’on en avait faite…

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La seconde affichette de l’annonce du « saut du français » n’est dédiée qu’à notre compatriote et ne comporte aucune mention des toros ni des toreros qui allaient officier ce jour-là. Elle reprend mot à mot le texte de la première, mais estropie dans le dernier paragraphe le nom de Daverat en l’appelant « Daudet »…

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Le saut à la barre ou à la garrocha

Ce type de saut, repris il y a quelques années par Nicolas Vergonzeanne, ne s’exécutait généralement que dans les courses hispano-landaises ou provençalo-landaises.

Voici ce qu’en dit Clic-Clac en 1905 :
« Ce saut d’essence provençale est pour ainsi dire délaissé de nos jours ; c’est à peine si nous avons vu un jeune Montois du nom de Roufian essayer de l’importer sur nos arènes, sans grand succès d’ailleurs.
Il consistait, comme dans le saut à la course, à partir à la rencontre de la vache, une barre de 2m.50 aux mains ; dès que la bête était à une distance voulue et calculée, l’homme posait un bout de la barre sur terre et s’élevait sur la force des poignets pour livrer passage à l’animal. Au moment exact du passage de la bête sous lui, il lâchait la barre qui bien souvent était projetée au loin par un coup de tête du fauve.
Les Provençaux sont très adroits dans cet exercice. Comme pour le saut à répétition, ils se mettent quelquefois deux et trois à la suite les uns des autres. L’aficionado landais n’est guère friand de cet exercice ; c’est peut-être parce qu’il le connaît fort peu. Car on voit souvent des bonds prodigieux. »

Pour confirmer les dires de Clic-Clac, voici le dessin des sauts exécutés par la cuadrilla provençale du Pouly lors des Fêtes du Soleil en 1887 (Le Monde illustré).

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En fait, loin d’être d’origine provençale comme l’écrit le célèbre revistero Clic-Clac, le saut à la garrocha faisait partie dès le 18e siècle des jeux de l’arène espagnols. Goya en donne d’ailleurs une représentation dans sa Tauromachie. Et voici celle publiée à l’appui de l’étude de Dufourcet et Camiade sur les courses de taureaux dans le Bulletin de la Société de Borda en 1891.

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On en trouve une version originale sur un superbe plat conservé dans les collections du Musée de la Faïence de Sarreguemines (Moselle). Il fait partie d’une série consacrée à la tauromachie et porte comme titre : « Le saut à la perche ».

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Les (anciennes) arènes de Soustons ont connu plusieurs courses hispano-landaises ou hispano-provençales, dont je vous montrerai au fur et à mesure plusieurs images. Sur celle que je vous présente aujourd’hui, on voit ce fameux saut à la garrocha qui était devenu l’une des figures classiques de ce type de course.

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Voici une autre plaza qui connut des courses « provençales », celle de Marciac dans le Gers. Cette carte écrite en 1903 montre le saut à la garrocha réalisé par l’un des membres de la fameuse cuadrilla dirigée par Alphonse Bayard.

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Très intéressante aussi, cette image publicitaire de la « Chicorée Daniel Voelcker-Coumes » à Bayon (Meurthe-et-Moselle) : comme quoi, nos « vieilles coutumes » de Gascogne étaient même connues des Lorrains vers 1900 !

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Voici une autreimage publicitaire sur les « courses de taureaux landaises », qui fait partie de la très riche collection du Chocolat Guérin-Boutron. Ici encore, c’est le saut à la perche ou à la garrocha qui est représenté, avec une autre suerte qui était celle de la chaise. On remarque que le taureau est emboulé et qu’il présente des cocardes un peu partout sur le corps…
Le texte qui accompagne ce dessin, quant à lui, ne devait pas déplaire à la Société protectrice des animaux : « Les courses de taureaux données dans les Landes diffèrent des courses espagnoles en ce qu’elles sont plutôt un jeu qu’un combat. Ici, point de chevaux éventrés, ni de taureaux tués. Ces courses ne sont qu’adresse et agilité »…

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Grâce à l’ami Patrick Capdegelle, homme d’aficion et de passion, voici maintenant une belle image d’un sauteur landais exécutant le fameux saut à la garrocha dans les arènes de Toulouse aux alentours des années 1890 semble-t-il. Il s’agissait bien sûr d’une course hispano-landaise, très à la mode à cette époque. Et le béret ne bouge pas, hilh de pute!

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Trouvée récemment, cette dernière carte nous prouve que le salto de la garrocha s’est également perpétué dans la course camarguaise. Réalisée par le grand photographe arlésien George, elle représente Granito II sautant le « Set-Mouraou » de Baroncelli dans les arènes des Saintes-Maries-de-la-Mer.

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