Le saut à la barre ou à la garrocha

Ce type de saut, repris il y a quelques années par Nicolas Vergonzeanne, ne s’exécutait généralement que dans les courses hispano-landaises ou provençalo-landaises.

Voici ce qu’en dit Clic-Clac en 1905 :
« Ce saut d’essence provençale est pour ainsi dire délaissé de nos jours ; c’est à peine si nous avons vu un jeune Montois du nom de Roufian essayer de l’importer sur nos arènes, sans grand succès d’ailleurs.
Il consistait, comme dans le saut à la course, à partir à la rencontre de la vache, une barre de 2m.50 aux mains ; dès que la bête était à une distance voulue et calculée, l’homme posait un bout de la barre sur terre et s’élevait sur la force des poignets pour livrer passage à l’animal. Au moment exact du passage de la bête sous lui, il lâchait la barre qui bien souvent était projetée au loin par un coup de tête du fauve.
Les Provençaux sont très adroits dans cet exercice. Comme pour le saut à répétition, ils se mettent quelquefois deux et trois à la suite les uns des autres. L’aficionado landais n’est guère friand de cet exercice ; c’est peut-être parce qu’il le connaît fort peu. Car on voit souvent des bonds prodigieux. »

Pour confirmer les dires de Clic-Clac, voici le dessin des sauts exécutés par la cuadrilla provençale du Pouly lors des Fêtes du Soleil en 1887 (Le Monde illustré).

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En fait, loin d’être d’origine provençale comme l’écrit le célèbre revistero Clic-Clac, le saut à la garrocha faisait partie dès le 18e siècle des jeux de l’arène espagnols. Goya en donne d’ailleurs une représentation dans sa Tauromachie. Et voici celle publiée à l’appui de l’étude de Dufourcet et Camiade sur les courses de taureaux dans le Bulletin de la Société de Borda en 1891.

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On en trouve une version originale sur un superbe plat conservé dans les collections du Musée de la Faïence de Sarreguemines (Moselle). Il fait partie d’une série consacrée à la tauromachie et porte comme titre : « Le saut à la perche ».

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Les (anciennes) arènes de Soustons ont connu plusieurs courses hispano-landaises ou hispano-provençales, dont je vous montrerai au fur et à mesure plusieurs images. Sur celle que je vous présente aujourd’hui, on voit ce fameux saut à la garrocha qui était devenu l’une des figures classiques de ce type de course.

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Voici une autre plaza qui connut des courses « provençales », celle de Marciac dans le Gers. Cette carte écrite en 1903 montre le saut à la garrocha réalisé par l’un des membres de la fameuse cuadrilla dirigée par Alphonse Bayard.

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Très intéressante aussi, cette image publicitaire de la « Chicorée Daniel Voelcker-Coumes » à Bayon (Meurthe-et-Moselle) : comme quoi, nos « vieilles coutumes » de Gascogne étaient même connues des Lorrains vers 1900 !

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Voici une autreimage publicitaire sur les « courses de taureaux landaises », qui fait partie de la très riche collection du Chocolat Guérin-Boutron. Ici encore, c’est le saut à la perche ou à la garrocha qui est représenté, avec une autre suerte qui était celle de la chaise. On remarque que le taureau est emboulé et qu’il présente des cocardes un peu partout sur le corps…
Le texte qui accompagne ce dessin, quant à lui, ne devait pas déplaire à la Société protectrice des animaux : « Les courses de taureaux données dans les Landes diffèrent des courses espagnoles en ce qu’elles sont plutôt un jeu qu’un combat. Ici, point de chevaux éventrés, ni de taureaux tués. Ces courses ne sont qu’adresse et agilité »…

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Grâce à l’ami Patrick Capdegelle, homme d’aficion et de passion, voici maintenant une belle image d’un sauteur landais exécutant le fameux saut à la garrocha dans les arènes de Toulouse aux alentours des années 1890 semble-t-il. Il s’agissait bien sûr d’une course hispano-landaise, très à la mode à cette époque. Et le béret ne bouge pas, hilh de pute!

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Trouvée récemment, cette dernière carte nous prouve que le salto de la garrocha s’est également perpétué dans la course camarguaise. Réalisée par le grand photographe arlésien George, elle représente Granito II sautant le « Set-Mouraou » de Baroncelli dans les arènes des Saintes-Maries-de-la-Mer.

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