Né à Pontonx-sur-l’Adour le 17 mai 1879 – Décédé à Pontonx-sur-l’Adour le 27 novembre 1916
» Le jeune Fillang, dont le frère aîné évolue depuis quelques années en formelle, débute dans les novilladas autour de Pontonx-sur-l’Adour. Son agilité, sa souplesse, son élégance et sa crânerie lui valent d’être engagé par le ganadero Lagardère qui le découvre à Dax. Première année en formelle en 1899 pour Le Petit Pontois, ou Fillang II comme on l’appelle alors, et premiers grands succès comme à Toulouse notamment et chez lui à Pontonx où pour sa quatrième course, il devait s’octroyer le premier prix de 250 f. Puis, pour sa présentation aux fêtes de Dax, Fillang jeune crée la surprise en trompant joliment la redoutable Castillana et en remportant le premier prix avec 150 f. alors que le second n’empoche que 40 f.! En 1900, il signe avec Bacarisse qui va veiller sur sa santé tant physique que morale et qui va faire de lui un véritable athlète. Les résultats de celui que l’on commence à surnommer « le grand Jean » dépassent les plus folles espérances : en six saisons, Fillang remportera pas loin de 90 prix, engrangeant la somme mirobolante de 25.830 f. (!!). (…)
Jean Fillang était vraiment le type de l’écarteur-né. Il était grand, svelte et possédait une souplesse de reins naturelle ; il avait du cran et surtout ce qui fait le champion, une extraordinaire « vista ». Souvent, lorsqu’il écartait, il laissait travailler d’abord ses équipiers pour juger le comportement de la coursière avant de l’affronter souvent « à monter-descendre » s’intéressant peu au teneur de corde, enlevant même la « ficelle » des cornes. Ses tête-à-tête avec les plus fameuses marraines de l’époque resteront à jamais de grands moments tauromachiques, comme en 1905 chez lui à Pontonx lors de l’une de ses dernières courses de Bacarisse où le Grand Jean exécuta une série de quinze écarts magistraux à la vieille Caputchina (…). En 1906, il se retrouve avec cette coursière chez le maître ganadero Barrère. Mais Fillang, que l’on surnomme alors « Le Roi de l’arène », avare de ses efforts, ne décroche que le cinquième prix du premier concours de l’histoire, à Mont-de-Marsan, alors que le lendemain, il conquiert de haute lutte le second prix à Nérac, après une seule journée de course ! Pourtant, « Fillang, lorsqu’il daigne s’employer, émerveille les spectateurs et électrise les aficionados… » comme l’écrivait le revistero J.-J. Diris (…).
Mais si les premiers prix sont toujours très nombreux, l’absence de son mentor, ses prétentions pécuniaires exagérées et la montée de jeunes comme Coran et Lacoste vont le pousser à « une inconstance capricieuse » et lorsqu’il se présente dans un paseo, personne ne peut préjuger de son travail : parfois il soulève l’enthousiasme du public, parfois c’est la fureur ! »
Après être passé comme chef chez René Passicos, il le devient en 1912 chez Portalier, et récolte encore de nombreux lauriers même s’il n’écarte plus que de façon occasionnelle. En 1914, il ne s’enrôle ni dans la cuadrilla de l’Elite landaise ni dans celle du Syndicat des toreros. Après une quinzaine d’années ou il marqua la course landaise, Jean Fillang disparaît prématurément en 1916 à l’âge de 37 ans.
Eléments biographiques tirés du Dictionnaire encyclopédique des écarteurs landais de Gérard Laborde (Editions Gascogne, 2008), p. 204-206 (avec l’aimable et amicale autorisation de l’auteur)
J’ai eu la chance récemment d’acquérir le n° 1 d’un journal édité à Mont-de-Marsan à partir d’avril 1911, il y a juste 100 ans, L’Echo de l’Arène. La une était consacrée à « Un grand torero landais, Jean Fillang ». Voici la photo qui ornait cet article, et qui représente, assis sur une chaise, celui que l’on nommait le « grand Manitou des écarteurs » ou encore le « Roi de l’Arène » (c’est cette même image qui est reproduite dans la notice que Gérard Laborde lui consacre dans son Dictionnaire). Un des principaux intérêts de l’article qui lui est consacré par Gustave Romarin dans L’Echo de l’Arène est que ce dernier a retrouvé un mystérieux « carnet rouge » dans lequel Fillang avait noté « soigneusement, au jour le jour et de sa propre main, toutes les lidias qu’il a courues, tous les lauriers qu’il a cueillis, tous les incidents auxquels il a été directement mêlé durant sa périlleuse carrière ». Où se trouve aujourd’hui ce document exceptionnel que le journaliste avait alors réussi à « exhumer du cabinet sévère d’un tabellion » ? Si quelqu’un le savait, il serait utile de le faire renaître et peut-être de l’éditer…
Voici la biographie qui est consacrée dans Mémoire des Landes à ce grand écarteur.
« Fillang (Jean) (Pontonx-sur-l’Adour, 17 mai 1879 – Pontonx-sur-l’Adour, 27 novembre 1916). Écarteur landais.
Jean Fillang succéda à Marin Ier dans la lignée des grands écarteurs landais. Associé aux principales ganaderias de l’époque – Baccarrisse, Barrère -, il était un torero prestigieux, appelé entre 1905 et 1910 le « roi de l’arène », et avait toutes les qualités requises pour devenir un excellent écarteur : la taille, la sveltesse, la souplesse des reins, le cran, la « vista ». Face à une vache landaise, il arrivait à imposer son art et sa volonté et n’abandonnait « l’animal qu’après épuisement de ce dernier ». Comme beaucoup de grandes vedettes, Jean Fillang n’a pas su abandonner l’arène au moment voulu. Alors que sa forme physique déclinait, une rivalité sourde l’opposa au jeune Koran qui commençait à être choyé du public et de l’afición en général. Il exerçait la profession de menuisier. »
Notice de Bernadette Suau, extraite de Mémoire des Landes, Mont-de-Marsan, Ed. Comité d’études sur l’histoire et l’art de la Gascogne, 1991, p. 150; dessin par G. Rémy, dans Les courses landaises. Souvenirs et croquis d’un revistero.