Voici un extrait du journal de Jean de Gaufreteau, Chronique bordeloise, tome 2 (1600-1638) (p. 11-12) (édition de 1878), trouvé par Christian Capdegelle. Il nous décrit une course organisée dans les rues de Bordeaux en 1604, et surtout nous fournit une preuve de l’ancienneté de cette coutume pour les fêtes de la Madeleine à Mont-de-Marsan et de la Saint Jean à Saint-Sever. Il pointe également que ce type de course se faisait avec des taureaux sauvages dans ces deux villes, alors qu’on se contentait de bœufs dans la capitale girondine… Nous avons conservé l’orthographe et la syntaxe d’époque.
« 1604. – Lure, premier jurat de Bourdeaux, fit courre les taureaux, aux jours gras de cette année, sur les fossés de Saincte-Eulaye, au devant de la maison où il se tenoit sur lesdits fossés. Ayant fait clore de charretes les advenues des rues de Caharnan, du Ha e[t] de la qui n’a point de bout, comme aussi de celles de la grand’rue Saincte-Eulaie e[t] de la ruette de la Plateforme, e[t] mesmes au droit de la Croix, despuis le couvent des Ursulines jusques au niveau des maisons de l’aultre costé, pour donner plaisir e[t] recreation au peuple, disoit-il. Mais est à noter : premierement, que ces taureaux n’estoyent pas des plus furieux ni semblables à ceux qu’on faict courre à Bazas le jour et feste de la Sainct-Jean, au Mont-de-Marsan à la Magdelaine, e[t] à Sainct-Sever à la Sainct-Jean aussi ; secundo, cette course se faisoit avec les chiens des bouchiers, car, en un mot, c’estoyent des bœufs ; tertio, c’est qu’une multitude de peuple, artisants e aultre populasse, tant hommes que femmes, s’estant plassés sur une muraille d’une maison appelée de Boutet, qui joignoit celle où est maintenant le couvent des Ursulines, ces gens chargerent tant cette muraille, qui estoit vielle e[t] menassoit ruine, qu’elle s’esbouilla toute. A cause de quoy, deux hommes y finirent leurs jours, e[t] plusieurs, de l’un de l’aultre sexe, furent estropiés e blessés griefvement ; ce qui fit destourner les yeux des assistants de la course des taureaux, pour voir cet aultre spectacle, qui fut grandement pitoyable. Les charretiers, à recognoistre leurs charretes, se batent. »
Dans le même ouvrage [tome 2 (1600-1638) (p. 157-158) (édition de 1878)], on trouve une mention concernant l’interdiction des courses que l’évêque de Bazas tenta d’imposer en 1628. Comme on le voit dans ce texte, cela faillit avoir des conséquences terribles pour lui-même et pour son frère…
« 1628. – Barraut, evesque de Bazas, cherche à empecher qu’on ne face courre le taureau ; le peuple se mutine et en fait sedition. Il court, à cause de ce, fortune de sa vie, et le comte de Barraut aussi, son frere, seneschal du Bazadois, qu’il avoit appellé pour tenir main forte à l’execution de l’arrest du Parlement et de l’ordonnance de M. d’Espernon. »